Guinée : Amnesty International alerte sur des abus au sein de la SOGUIPAH et formule plusieurs recommandations

Ce jeudi 23 octobre 2025, à travers une conférence de presse tenue à la Maison de la presse de Guinée, Amnesty International a rendu public un rapport dénonçant des violations des droits des travailleurs au sein de la Société guinéenne de palmiers à huile et d’hévéa (SOGUIPAH), une entreprise publique guinéenne.

Selon les conférenciers, ce rapport, basé sur des recherches menées entre 2024 et 2025, repose sur des enquêtes de terrain et des témoignages de travailleurs et de planteurs affectés par les activités de la société.

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S’agissant des conditions de travail, il déplore le non-respect du salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG), fixé à 550 000 francs guinéens depuis 2022. « Ce que nous avons constaté dans cette entreprise, qui est une société d’État, c’est que de nombreux bulletins de salaire consultés montrent que le salaire minimum n’est pas appliqué. Certains travailleurs perçoivent même moins de 100 000 francs guinéens par mois pour environ 170 heures de travail », a-t-il dénoncé.

Le chercheur a également évoqué le cas des planteurs familiaux et de leurs employés, contraints selon lui de vendre leurs produits (EVA, noix et huile de palme) à la SOGUIPAH à des prix inférieurs à ceux du marché. « Il existe une convention signée dans les années 1990 régissant les relations entre la SOGUIPAH et les plantations familiales. Mais les syndicats et représentants rencontrés disent ne pas avoir accès à ces documents. Ce manque de transparence alimente une situation d’injustice économique », a-t-il précisé.

Sur le plan de la sécurité et de la santé, Amnesty International estime que la SOGUIPAH ne respecte pas ses obligations envers les travailleurs et que l’État guinéen n’assure pas pleinement son rôle de protection. « La SOGUIPAH a failli à ses devoirs en ne respectant pas certains droits fondamentaux, et l’État guinéen a également failli à son obligation de veiller au respect de ces droits », a insisté Fabien Hoffner.

Concernant la question foncière, le chercheur a fait état de cas d’expulsions forcées dans les zones de Galakpaye et Balan, près de la frontière libérienne, dans la région de Diécké. « Nous avons rencontré des dizaines de personnes qui ont été sommées de quitter leurs champs sans avoir reçu d’indemnisation juste et préalable », a-t-il déclaré.

Il évoque également un climat d’omerta et de peur. « Dans cette région, nous avons constaté une véritable crainte de s’exprimer publiquement sur les abus commis par la société. »

Dans son rapport, l’organisation a formulé plusieurs recommandations à l’endroit de l’État, de l’inspection du travail et de la SOGUIPAH :

À l’État guinéen :

Ouvrir sans délai une enquête complète, objective et indépendante sur les abus documentés ;

Garantir la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association, conformément aux engagements internationaux et à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

À l’inspection du travail :

Mener une mission de contrôle au sein de la SOGUIPAH, comme prévu par le Code du travail, afin de constater les manquements persistants.

À la SOGUIPAH :

Garantir aux planteurs familiaux un prix d’achat conforme au marché, assurant un revenu décent à eux et à leurs employés ;

Appliquer immédiatement le salaire minimum légal, conformément au Code du travail et aux conventions de l’OIT ;

Publier les conventions et contrats définissant les relations commerciales entre la société et les planteurs.

Enfin, les conférenciers ont précisé que ce rapport repose sur les témoignages de 90 personnes interrogées entre 2024 et 2025. Ses conclusions ont été transmises aux autorités guinéennes et à la direction de la SOGUIPAH le 3 octobre dernier afin d’obtenir leur réaction.

Cependant, aucune réponse n’avait été reçue par Amnesty International au moment de la publication du rapport.

Aliou Diaguissa Sow

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